Message de Noël
S'il y a un combat qui dure sur ce blog, c'est le combat pour la laïcité (2006, 2007, 2008). La laïcité n'est pas un anti-cléricalisme mais au contraire le respect de toutes les religions et le respect des religions envers les autres religions et ceux qui croient mais pas en une religion (agnostiques) comme ceux qui ne croient pas (athées).
Les Français se targuent de laïcité. Martine Aubry l'a même élevé au rang de valeur fondant l'identité nationale à Rennes comme je l'ai fait en octobre ou comme Rama Yade l'a fait la semaine dernière. Mais peut-on dire que la France est laïque alors que l'Etat censée neutre entre les religions propose des jours fériés religieux? Il n'y a pas d'égalité entre les religions et la laïcité française est donc biaisées. Noël en est un des exemples les plus frappants. Le 15 août aussi d'ailleurs.
Aujourd'hui, le gouvernement organise un débat sur l'Identité Nationale. La raison à peine voilée est bien la montée de l'Islam en France due à une immigration de pays très pauvres. La France se retrouve dans la même situation qu'au XIXème Siècle et au début du XXème Siècle où une très forte immigration juive est arrivée en France. Cette immigration en France et en Europe d'ailleurs a créé de nombreuses tensions et de mouvements antisémites qui menèrent à la Seconde Guerre Mondiale. Aujourd'hui, les mêmes tensions et la même violence envers l'Islam apparaissent face à cette nouvelle immigration. Bien entendu, au lieu de parler des causes qui poussèrent les juifs avant les années 1940 et les musulmans après les années 1940 à s'installer en France, le gouvernement préfère réfléchir sur les conséquences que ça engendre en France. Soit. Le premier me semble pourtant intellectuellement plus motivant mais faisons avec.
Le processus d'intégration des juifs et des musulmans en France suit le même parcours à 150 ans d'écart :
- phase 1 : arrivée par vague des différents pays d'immigration (pays de l'est), arrivée par l'annexion de territoires (colonies) pour les juifs, arrivée des musulmans suite à l'annexion de territoires puis immigration suite à la décolonisation en provenance de ces mêmes territoires.
- phase 2 : total dédain des français envers cette immigration qui a les métiers "sales" : usuriers pour les juifs, nettoyage, bâtiment pour les musulmans. même s'ils participent à la vie sociale et publique en payant des impôts, taxes etc...
- phase 3 : les immigrés s'installent dans le paysage français mais reste au sein de leur communauté. Les français refusent de les intégrer à la communauté car au final ce sont des gens aux métiers "sales". Certains voire la plupart obtiennent le droit de rester et de vivre en France en étant naturalisés car la machine administrative a souvent un processus d'intégration plus rapide que celui de la société (10 ans de travail en France, naissance en France...).
- phase 4 : une double phase, c'est soit l'échec soit la réussite. L'échec, une partie de l'immigration ne résiste pas à la pression sociale et retourne au pays d'origine ou tente dans un autre pays pour faire sa vie. Ou la réussite, une partie de l'immigration résiste à la pression sociale, sort du rôle qui lui était dévolu à l'origine. A ce stade, on est dans la deuxième génération d'immigrés, et elle intègre en force l'administration publique. Pourquoi l'administration publique? Parce que c'est le secteur le plus méritocratique et le moins susceptible de subir de discrimination religieuse/raciale/etc...
- phase 5 : les Français se rendent compte qu'il y a une immigration (oui les Français mettent un peu de temps avant de réagir) et se disent 1/que la solution c'est de les repousser à la mer 2/que leur situation en France est indigne de la France 3/qu'ils doivent changer leur identité pas assez française s'ils veulent rester.
- phase 6 : les gens débattent. On connait le résultat que ça a donné avec les Juifs. La solution 1 a été retenu. Aujourd'hui, le débat se situe entre les positions 1 et 3. Soit il faut les rejeter, soit il faut les acculturer.
Leur permettre de vivre dans la dignité n'est pas en débat aujourd'hui. C'est dommage. Et pourtant dans le pays des Droits de l'Homme et du Citoyen le droit de vivre dignement, d'être protégé de sa libre pensée de croyance, politique, sexuelle est un Droit constitutionnel. La Laïcité comme je le disais plus haut doit permettre aux Hommes de vivre leur religion dans leur sphère privée, la sphère publique devant être neutre et a-religieuse. La laïcité limite la pratique religieuse du moins des juifs et musulmans, il lui manque encore cette neutralité avec les chrétiens. D'ailleurs l'Etat en est consciente. Savez-vous que la fonction publique donne trois jours de congés par an pour motif religieux? Par contre, le secteur privé peut toujours attendre même s'il représente 77% des actifs français.Cette question de l'inégalité de traitement entre les religions reste encore en suspens. A chaque fois que j'écris sur ce débat, le même étonnement et la même réaction offusquée ressort de ces conversations : "Mais si la France est un pays laïc et met à égalité toutes les religions". Justement non !
Alors puisque c'est Noël et que ce texte s'appelle message de Noël, demandons-nous quel devrait être la conséquence de ce débat sur l'identité nationale dans un monde merveilleux où les miracles arrivent?
1/ Ce n'est pas la couleur de peau, la religion, l'opinion politique qui fait la carte d'identité nationale,
2/ l'identité nationale est l'ensemble de cinq valeurs qui sont dans l'acronyme LEFTS : Liberté Egalité Fraternité Tolérance Solidarité,
3/ l'Islam comme le Judaïsme et le Christianisme sont compatibles avec l'identité nationale tant qu'elles se plient à ces valeurs (et je ne me fais aucun doute que toutes les religions se plient à ces valeurs),
4/ l'immigration est un bienfait culturel, économique, social et génétique,
5/ l'immigration vers la France prouve que nous sommes riches et comme l'immigration nous enrichit (voir point 4) nous devons faire le mieux possible pour l'accueillir.
6/ la cohabitation des religions ne peut se faire que sous le regard de la Constitution française.